2010

De quelle philosophie Bergson était-il capable avant de devenir lui-même ? Telle est sans doute la question que l'on ne manquera pas de se poser en ouvrant ce cours inédit qui fait écho aux deux cours également inédits publiés dans la même collection, mais donnés, eux, quelques années plus tard au lycée Henri-IV à Paris. Que les cours faits au lycée de Clermont-Ferrand entre 1883 et 1888, et plus précisément ceux de 1886-1887, suscitent une réelle curiosité, rien de plus légitime. En tant que témoignage de la voix même de Bergson, ces leçons possèdent une valeur inestimable. D'une part, nous avons souvent l'impression d'assister directement au cours et même, notamment en lisant les leçons d'économie, de mieux saisir la personnalité et les convictions du jeune agrégé nommé en province. D'autre part, il est clair que le présent cours de Clermont-Ferrand de 1886-1887 restitue bien quelque chose du génie naissant du grand homme. En tout cas, une chose est sûre : ces années-là, le futur auteur de l'Essai sur les données immédiates de la conscience fait déjà preuve d'un rare talent philosophique. Car Bergson ne reprend jamais tels quels les matériaux de manuels ni sans doute la matière de cours qu'il a lui-même suivis ou que d'anciens condisciples ont pu lui prêter. Ainsi que le note Alain Panero dans sa présentation, le professeur Bergson, qui semble échapper comme par miracle à la routine, ne saurait jamais être pris en flagrant délit d'automatisme psychologique.